Pendant cette semaine de voyage au Liban, nous passons et repassons à Beyrouth, happés par sa grandeur et sa splendeur. La ville est immense et il nous faudrait sûrement plusieurs mois pour nous l’approprier. Et pourquoi pas ? Beyrouth c’est un carrefour. C’est le mélange des cultures de l’Est et de l’Ouest, des religions, des salaires et… des temps. Le passé est toujours présent, l’avenir est déjà là et le présent lie le tout.
Beyrouth, comment décrire cette capitale qui ne ressemble à aucune autre. Il est 3h du matin, nous voilà arrivés à l’aéroport. Notre hôte nous a commandé un taxi ; on raconte beaucoup d’histoires sur les trajets de nuit à Beyrouth « pas recommandables », « uniquement avec des proches », « sans passer par le Sud de Beyrouth ». Fatigués, un peu inquiets et très excités, l’aventure peut commencer… par quelques heures de sommeil.
Beyrouth est une ville hétéroclite, un véritable melting-pot, le New York City du Moyen-Orient, la ville où tout est possible lorsque les interdits règnent chez les voisins. C’est l’échappatoire, la grandeur, l’Art. La délinquance ? Peut-être mais nous ne l’avons pas croisée. La richesse et la pauvreté, l’immigration ; nous les avons côtoyées.
Saviez-vous qu’il y a un grand nombre d’immigrés éthiopiens au Liban ? Je l’ignorais. Beaucoup semblent plus être des esclaves des temps modernes que des habitants bien intégrés. Ils nettoient, s’occupent des enfants, des parkings, dorment dans la chambre de bonne et sortent pour se rendre au Western Union. Force et courage.
Mais revenons à la découverte de la ville. Nous ne sommes pas sans ignorer qu’il y a peu, ici, c’était encore la guerre. Avec des zones de no man’s land. Des bâtiments détruits. La ville n’est pas entièrement rénovée. Beaucoup de bâtiments sont à l’abandon, en attente de leur sort : on détruit ? on rénove ? on oublie ? Solidere, vous connaissez ? Solidere, c’est un fonds d’aide à la reconstruction offert par l’Arabie Saoudite au Liban après la guerre. Quelle générosité… Mais les avis sont partagés : difficile d’accepter les nouveaux projets, de voir son ancien quartier changer. Le renouveau, c’est maintenant ou jamais, pour les générations futures.
Le souk de Beyrouth a été trop endommagé pendant la guerre. Il ne sera pas rénové et laissera place aux nouveaux souks de Beyrouth : un immense centre commercial à l’architecture ultra moderne. Downtown Beirut : la modernité, les gratte-ciels et les hôtels. Mais aussi le vide… Suite à de violentes manifestations il y a quelques années, le gouvernement décide de fermer l’accès de Downtown Beirut aux foules. Les restaurants ferment, les cafés aussi, les larges allées se vident. Réouvertes depuis à peine quelques semaines lors de notre séjour, un café et un restaurant venaient tout juste de s’y réinstaller mais les foules ne sont pas encore revenues. Un soldat posté à chaque entrée de ces belles avenues vides et rénovées : Will Smith pourra-t-il tous nous sauver ?
On marche encore un peu et nous retrouvons nez à nez avec un site archéologique, une mosquée et une église. La mosquée bleue est toute récente : 2010. La tour de l’église est également toute récente. Qui a la plus grande ? C’est la même taille on vous dit !
On continue de marcher et là, tout au fond d’un jardin, une torah perce difficilement sa voie vers le ciel cachée par la végétation. L’ancienne synagogue n’est plus accessible, quel dommage !
Quelques pas encore pour affronter l’ancien Holiday Inn. Ravagé par la guerre dont il fut un symbole, il brille de mille feux et nous rappelle les deux passés, triste et joyeux, de la capitale, le plus haut bâtiment, le plus précieux, le Tourisme d’avant-guerre.
En haut de la colline, les bains romains, superbe site archéologique, témoin d’un temps lointain.
Et si l’on s’aventure en direction de la mer, c’est les néons, les dollars et… le Raouché qui nous accueillent. Le Raouché, celui que l’on voie en tapant « Beyrouth » sur n’importe quel moteur de recherche. On se croirait à Etretat. Les restaurants attirent les touristes avec leur promesse de « meilleure vue » et leurs prix exorbitants, on se prend des selfie sticks dans la tête pour nous aussi apprécier… le coucher de soleil sur le Raouché.
Ashrafyeh, Mar Mikhael nous rappellent que la jeunesse et les hipsters sont présents dans les villes les plus agréables du Monde et Beyrouth n’est pas une exception. Bar après bar, restaurant après restaurant et boutique après boutique je me dis que me balader ici, c’est un peu comme un samedi de printemps aux alentours de Gärtnerplatz (Munich), en mieux.
Nous n’avons pas vu beaucoup de parcs à Beyrouth, mais nous avons particulièrement apprécié nous promener autour du palace et du musée Sursock. Entre eux, un joli petit dédale de ruelles, des escaliers colorés et de la verdure. L’apogée ; la visite du musée, gratuit, avec de sublimes collections, permanentes et temporaires, et de très belles salles historiques.
Si j’avais eu un peu plus de temps j’aurais voulu…
- aller voir un film dans l’un des nombreux petits cinémas de quartier de type art et essai.
- flâner dans les rues du quartier arménien, passer du temps dans l’un de ses restaurants, me gaver de gourmandises arméniennes, la larme à l’oeil en pensant à mon arrière-grand-père, trop jeune immigré arménien à Beyrouth pendant le génocide. Je n’étais sûrement pas encore prête pour ce moment d’émotion.
- visiter le musée d’archéologie. Nous y passions toujours devant à sa fermeture.
- faire une visite guidée avec Walk in Beirut. Il n’y avait plus de place. Nous avons choisi une autre compagnie, mais j’aurais aimé faire celle-ci et vivre l’histoire un peu plus longtemps.
- Me balader encore et encore. Aller faire la fête, un peu plus et un peu plus tard. Boire un autre verre de vin et me sentir libre de pouvoir le faire, ici, au Moyen-Orient.